Tout le monde connait Mononoke Hime...

Film-testament du réalisateur Miyazaki Hayao, Mononoke Hime (ou Princesse Mononoké en Français) est une superbe fresque où se mêlent écologie, aventure et histoire du Japon.
Mais c’est également une légende moderne qui reprend les grands thèmes des croyances populaires japonaises.

La religion populaire se caractérise par une multitude d’entités révérées, appelées kami.

Les kami sont à la fois des divinités, des forces de la nature, des amas d’énergie vitale ou d’âmes. Ils n’ont pas de forme définie et peuvent revêtir toutes les apparences, même s’ils ont chacun leurs formes préférées.

Il est impossible d’estimer précisément le nombre de kami révérés dans l’archipel - quelques dizaines ou centaines de millier.

Chaque village possède ses propres kami : kami des limites, qui protège le village du monde sauvage extérieur, kami du sol, sorte de génies attaché à un lieu, kami tutélaire des clans ou des familles, etc.

Et à ceux-ci s’ajoutent les kami révérés dans tout le pays.

Les divinités mises en scène dans Mononoke Hime sont les Yama no kami c’est-à-dire les divinités de la montagne, qui est, au Japon, un territoire sacré, peuplé d’êtres surnaturels.

La montagne, un espace sacré

La montagne impressionne par sa masse.
Elle est le lien entre la terre et le ciel, qu’elle soutient.

Immuable et pourtant toujours changeante, la montagne est un monde secret, fait d’illusion et de mystère.
Bûcherons, charbonniers ou chasseurs, ceux qui devaient y pénétrer régulièrement pour gagner leur vie connaissaient bien les dangers qu’elle recèle.
Ils la considéraient comme un territoire sacré et pur, dissimulant mille pièges, naturels et surnaturels.

La montagne abrite des esprits qui peuvent parfois être bénéfiques, mais qui sont toujours dangereux. Il s’agit de divinités spécifiques désignées par l’appellation générale de yama no kami (kami de la montagne).
Ces divinités sont les maîtres de leur montagne et peuvent être impitoyables envers l’imprudent qui aurait pénétré leur territoire sans prendre de grandes précautions.

Ces divinités peuvent être celles de l’eau, mais aussi du feu, car la montagne est à la fois le domaine des deux éléments.

Elle est en effet l’intermédiaire entre le ciel et la terre.
Elle reçoit la pluie et en déverse l’eau, par ses torrents, ses rivières et ses ruisseaux, jusque dans la vallée où vivent les hommes.
Mais au Japon la montagne est toujours volcanique ; c’est donc aussi le territoire du feu et des explosions violentes.

La montagne est également le domaine des morts, l’autre monde. C’est une croyance très ancienne dans l’archipel, antérieure même à la formation du peuple japonais, mais ce n’est pas la seule vision japonaise de l’au-delà.

Sa Majesté Fuji San

Et LA montagne du Japon c’est le mont Fuji...

Depuis le dixième siècle, une légende romantique fournit une explication aux colères de sa Majesté Fuji San : la légende de la princesse Kaguya.

Kaguya Hime

Un jour, un vieux coupeur de bambous découvrit une petite fille d’une infinie beauté dans une forêt de bambous au pied du mont Fuji.
Il la présenta à sa femme qui l’adopta sur-le-champ et la nomma Nayotake no Kaguya Hime : “Radieuse Princesse des Bambous Graciles”.

La jeune fille, choyée par ses parents adoptifs, grandit rapidement et devint la plus belle femme de toute la région.
Et bientôt de nombreux prétendants se présentèrent pour la demander en mariage.
Finalement, elle accepta pour époux un puissant seigneur local.
Ensemble ils connurent plusieurs années de bonheur...

Pourtant une année, l’humeur de la princesse Kaguya s’assombrit.
Et, le huitième mois du calendrier lunaire elle dévoila sa vraie nature à son mari...
Elle lui révéla qu’elle n’était pas humaine et qu’elle appartenait au peuple de la lune. Elle lui annonça de plus que le 15 du mois, jour de la pleine lune, ses parents devaient venir la chercher.

Et, en effet, le 15e jour du huitième mois du calendrier lunaire, le roi de la lune, escorté par quelques-uns de ses fidèles, vint récupérer sa fille.

Les supplications du coupeur de bambous furent vaines et les nombreux soldats mobilisés par le seigneur local restèrent impuissants, subjugués par l’éclat des êtres descendus de la lune.

Pourtant, avant de partir, la princesse Kaguya remit à son mari un miroir magique dans lequel elle apparaîtra chaque fois qu’il regardera dedans.

Fou de douleur, le seigneur poursuivit sa bien aimée jusqu’au sommet du mont Fuji. Et là, serrant contre son cœur le miroir magique, il se jeta de dépit dans le cratère du mont Fuji.
Un instant plus tard une violente éruption volcanique eut lieu.

Depuis, on dit que les éruptions de Fuji San expriment le dépit amoureux de l’ancien gouverneur de la région du mont Fuji.

On dit aussi que, de temps en temps, la princesse Kaguya apparaît au-dessus du mont Fuji qu’elle illumine de son étincelante beauté...

P.-S.

Inspiré par une thèse dont l’auteur est inconnu...